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* Le tront bastionne st du tort Urouet
Le fort Drouet
redcouvert
Le 3 aot 2009, une quipe technique
de l'Institut de Sauvegarde du Patrimoine
National (ISPAN) s'est rendu en mission de
reconnaissance dans la chane des Matheux,
sur les hauteurs de Dlices, 5e section
communale de l'Arcahaie.
Profitant de la construction de la nouvelle
route entreprise par le Centre National
d'Equipements (C.N.E.) qui reliera bientt
Cabaret La-Chapelle, dans 'Artibonite, et
qui permet dj d'accder facilement une
region qui a t, vers la fin du XVIlle sicle,
une zone important de production cafire,
'ISPAN a entrepris cette mission dans le but
d'investiguer, de dcouvrir et d'identifier, in
situ, les vestiges des nombreuses installations
agricoles et militaires qui ont t signals
dans des textes et mmoires d'archives.
Cette route spectaculaire, qui conduit
partir de Cazale plus de 1300 mtres
d'altitude, offre des vues extraordinaire la
La suite de l'article sur les fortifications de Marchand-Dessalines vous sera prsente au
prochain numro de BULLETIN DE LISPAN. La rcente visit de I'ISPAN au fort Drouet et
l'habitation cafire colonial de Dion dans les Matheux s'est rvle si fructueuse et si
important que nous nous sommes empresss de vous en communiquer les rsultats.
fois sur le golf de la Gonve et sur lavalle de
'Artibonite que sillonne majestueusement le
fleuve du mme nom. Cette route, quoique
non encore revtue d'asphalte, permet dj
d'accder en moins d'une heure au sommet
des montagnes de la chane des Matheux.
l'occasion de cette mission, les
technicians de 'ISPAN ont pu identifier une
construction militaire et trois habitations
cafires. Il s'agit du fort Drouet, des ruines
de l'habitation cafire Dion et de celles de
deux autres habitations cafires don't les
noms d'origine et les parties constructive,
la phase actuelle des recherches et de nos
connaissances, n'ont pas encore t tablis
avec certitude.
Laissant le vhicule au lieu-dit Kotad,
on accde au fort Drouet par un chemin
de crte au bout d'une heure de march.
Construit au lendemain de la proclamation
de l'Indpendance selon une ordonnance de
Jean-Jacques Dessalines datant de mars 1804,
ce fort fait parties de la vingtaine d'ouvrages
fortifis conus et raliss surtout leterritoire
pour faire face un ventuel retour offensif
des Franais (Voir BULLETIN DE I'ISPAN
No 3). Il s'agit d'une imposante construction
constitute d'un pais mur d'enceinte, faisant
par endroits plus de cinq mtres de hauteur,
perc de nombreuses meurtrires pour le tir
au fusil et d'embrasures canon. Ces murs
d'enceinte entourent une place d'armes sur
laquelle se trouvent une poudrire classique
faite de forte maonnerie et deux citernes
destines au stockage de l'eau. Deux canons
en fonte gisent cte cte sur le sol, semblant
Sommaire
Le fort Drouet
L'habitation cafire colonial de Dion
Chronique des monuments et sites
historiques d'Hati
BULLETIN DE LISPAN est une publication de l'Institut de Sauvegarde du Patrimoine National destine informer
le public sur l'actualit de la protection et la mise en valeur des biens immobiliers valeur culturelle et historique de
la Rpublique d'Hati. Communiquez votre adresse lectronique ispan.bulletin@gmail.com pour recevoir
rgulirement le BULLETIN DE LISPAN.Vos critiques et suggestions seront grandement apprcies. Merci.
BULLETIN DE L'ISPAN No 4 1er septembre 2009 I
I5WqN
attendre encore leur position definitive. Un
troisime est plac une embrasure de la
faade Est.
Positionne sur une minence, cette
fortification cinq bastions, don't le plan
resemble fortement celui du fort
Madame Marchand-Dessalines, contrle
un trs large primtre et joue le rle de
vigie portant ses vues la fois sur le golfe
de la Gnave et la valle de l'Artibonite. Le
fort Drouet tablit, galement, un contact
visuel avec le fort Delpche (1804) situ
vers l'Ouest dans les mornes surplombant
Willliamson et Carris.
Plac dans une important zone de pro-
duction de caf, le fort a t construct just
au-dessus d'une grande habitation cafire,
datant, de toute evidence, de la priode co-
loniale franaise et don't les ruines imposan-
tes permettent de distinguer deux immen-
ses btiments. Le premier est caractris
par de vastes sales pourvues de multiples
chemines. Ces sales pourraient avoir servi
d'ateliers de traitement ou de stockage des
fves de caf. Le second, plac en contrebas
et auquel on accde par un escalier monu-
mental, domine le golfe de la Gnave et of-
fre, au loin, une impressionnante vue de la ....
cte et de la plaine de l'Arcahaie.
NOTE: Pendant que nous procdions au montage du
BULLETIN DE LISPAN No 4, le CNE, la demand de
la DG de I'ISPAN, a ouvert, en moins de quinze jours,
la route menant de Kotad au fort Drouet et a procd
son nettoyage, selon les specifications techniques de
l'Institut. Le monument historique est actuellement
accessible en voiture tout-terrain, depuis le 30 aot.
SLes ruines de la cafterie qu
f bitation cafire colonial de Dion
et ses ruines de logements d'esclaves
A partir des informations recueillies
auprs des habitants des Dlices (Section
communale de l'Arcahaie) et poursuivant la
route vers l'Est, en direction de La-Chapelle
pendant une dizaine de minutes, l'quipe de
I'ISPAN s'est ensuite rendu au lieu-dit Ka-
Dyon, o elle a pu dcouvrir les vestiges "
de la plus important installation cafire
colonial identifie jusqu'ici dans le pays. Son
importance en superficie dpasse celle de
l'habitation Sguineau, situe prs de Fond-
Baptiste, et celle de Beaucher Marmelade,
rpertories en 2003 par la Fondation pour
le Dveloppement Durable et Intgre de
Marmalade (FONDDIM) et I'ISPAN.
Les ruines de l'habitation Dion s'articulent
autour d'immenses glacis couvrant une
superficie approximative de 4200 mtres
carrs. On y retrouve les ruines de la Les ruines de I
* Le TorT uroueT
e domine l'Est le fort Drouet
a cafterie de l'habitation Dion
BULLETIN DE L'ISPAN No 4 1er septembre 2009 2
cafterie proprement dite, des reservoirs
d'eau de pluie aliments par des canalisations
et d'un btiment qui vraisemblablement
devait servir d'entrept.
Cependant, la dcouverte la plus
surprenante de cette visit de l'habitation
Dion a t localise en contrebas des glacis,
en prolongation vers l'Est, o se trouvent
disposs, autour d'une vaste cour central,
trois difices identiques construits en forte
maonnerie mesurant environ 32 mtres de
long sur 5 mtres de large. Ils sont constitus
chacun de 7 cellules d'environ 4 mtres sur
4 mtres: il s'agit des logements des esclaves
de l'habitation. A ces trois difices, il faut de
plus adjoindre deux autres corps de btiment
abritant des logements d'esclaves galement
et constitus de quatre ranges de cellules
chacune. Ces deux btiments, eux, sont
situs l'entre Ouest de l'habitation.
Ces btisses en maonnerie forment,
sans contest, le plus important group
de logements d'esclaves identifies jusqu'
aujourd'hui en Haiti.
Il est important de rappeler que la
culture du caf a fait son apparition Saint-
Domingue vers les annes 1740 et se
propagea une vitesse fulgurante travers
la colonies. Elle s'tablit sur les contreforts
et les sommets des montagnes (en plein
territoire du marronnage) o elle trouva le
climate idal pour son dveloppement. la
veille de la revolution, 50 ans plus tard, le
caf arrivait mme concurrencer le sucre,
denre par excellence de la colonie. Alors
qu'en 1750 on produisait 7 millions de livres
de caf, en 1789, dj, la production atteignit
le chiffre record de 77 millions de livres.
Les plus importantes zones de production
cafire de la colonie se situaient dans l'axe
Plaissance Marmelade Dondon dans le
Nord, dans la chane des Matheux, dans les
hauteurs de Cabaret jusqu' Goyavier, prs
de Saint-Marc, et sur le versant sud du massif
de la Selle.
Si dans les habitations sucrires des planes,
les esclaves jouissaient du loisir d'difier
leurs propres logements qu'ils finissaient
par runir en de vritables petits villages,
dans les mornes, ils taient traits comme
de vritables bagnards, enferms dans une
prison et subissant le contrle permanent
des commanders, sous le regard vigilant
du colon. C'est ce qui explique le caractre
carcral de l'architecture des logements
d'esclaves des habitations cafires. Les
cellules de l'habitation Dion illustrent
parfaitement cette condition de servitude.
Le dveloppement de l'exploitation du
caf par les colons de Saint-Domingue
fut dfinitivement interrompu lors des
troubles de la Rvolution. Aprs une brve
et infructueuse tentative de dfendre
ces infrastructures contre les incursions
ravageuses des rvolts par la construction
de vigies, de posters de surveillance, de
blockhaus et par la creation de milices
armes, les colons dmantelrent finalement
leurs installations et migrrent avec leurs
nombreux esclaves vers la Nouvelle-Orlans
et surtout dans la parties orientale de Cuba.
Dans la province d'Oriente Cuba, les colons
franais et leurs esclaves reproduisirent les
habitations cafires de Saint-Domingue sur
les pentes des sierras autour de Santiago
et transformrent radicalement la region
tant au niveau conomique qu'au niveau
culture. Toute la collection des vestiges de
ces habitations cafires de Cuba a t
inscrite sur la liste du Patrimoine Mondial
par l'UNESCO en l'an 2000 sous le nom de
Caftales Franco-Haitianos.
Par les couches d'utilisation qu'ils ont
cres en quelques dizaines d'annes
d'existence, ces logements d'esclaves des
habitations cafires coloniales devraient
faire l'objet de recherches archologiques
pousses qui permettraient de mettre
jour des aspects entirement mconnus
de l'esclavage Saint-Domingue. Les
habitations cafires coloniales de la chane
des Matheux et particulirement l'habitation
Dion constituent une extraordinaire mine
d'informations sur la vie quotidienne des
esclaves de Saint-Domingue.
NOTE :Cette mission exploratoire aux Matheux tait
compose de R Chtelain, Architecte, d'E. Colas, Ing-
nieur, et de D. Elie,Architecte. Elle fut ralise grce aux
prcieuses informations communiques par M. Jean-
Maurice Buteau et de l'Ingnieur Jude Clestin, DG du
C.N.E., concernant la localisation gographique exacte
de l'habitation Dion et du fort Drouet.
une range oe ceiiuies esclaves a i naDidation ion
SOrthophotographie de I'habitation Dion, repre 18 52,507" N et 78 22,74 1 O
BULLETIN DE L'ISPAN No 4 1er septembre 2009 3
Chronique
des monuments et sites historiques d'Hati
Exposition sur le centre historique
de Jrmie
Depuis le samedi 22 aot 2009, I'ISPAN
prsente au Centre Culturel Numa-Droin,
au Lyce des Jeunes Filles de Jrmie,
une exposition sur le thme : Le centre
historique de Jrmie, un patrimoine en pril.
Cette exposition rentre dans le cadre d'une
champagne de sensibilisation entreprise par
I'ISPAN et la Mairie deJrmie et a t conue
pour souligner la richesse et les potentialits
des btiments anciens et des spaces urbains
du centre historique de la ville, ainsi que les
dangers, les menaces et les dfis auxquels ils font
face aujourd'hui. Constitute de 40 panneaux
d'environ 90 x 120 cm abondamment illustrs
et s'appuyant sur une solide documentation,
cette important exposition a pu tre ralise
grce l'appui financier du Bureau du Premier
Ministre et de la Fondasyon Konesans al Libte
(FOKAL).
Cette exposition a reu un accueil
enthousiaste, auprs des jeunes Jrmiens et
des visiteurs de passage l'occasion de la Saint-
Louis, la fte patronale. Le public a manifest
une trs grande curiosity et dmontr
un intrt norme ainsi qu'une profonde
preoccupation pour la preservation et la mise
en valeur du patrimoine de leur ville. Conue
pour tre aisment transportable, cette
exposition est appele voyager travers les
principles villes de la Grande-Anse. LISPAN
souhaite ardemment pouvoir obtenir les fonds
ncessaires pour raliser une second version
de cette exposition Port-au-Prince, Le
Premier Ministre, Mme Michle Pierre-Louis
lors de son passage le 25 aot dernier dans
la ville a visit avec beaucoup d'intret cette
exposition.
Difficile gestion des PNH*
Suite une coupure de son budget
d'investissement survenu au mois de mai
2008, I'ISPAN a d arrter net tous ses projects
et activits en course. On se souvient des
pripties du chantier du mur de soutnement
de l'escalier monumental du Palais du Roi
Sans-Souci (voir BULLETIN DE LISPAN
No 2). Les travaux d'amnagement du Parc
National Historique de Marchand-Dessalines
et la restauration des forts Culbut et Dcid
I
De g. d. et de h. en b.:
Le Premier Ministre, Mme Michle Pierre-Louis signant le livre des invits
* M. Maurice Lonce, historien de la ville, admirant une des planches de l'exposition
Une vue gnrale de l'exposition
furent galement stopp brusquement, sans
measures conservatoires, pour les mmes
raisons. Ainsi, le personnel de soutien du Parc
National Historique Citadelle Henry, Palais de
Sans-Souci et le Site fortifi de Ramiers n'ont
pu depuis recevoir leur salaire mensuel. Une
dette dpassant les douze mois de salaire s'est
accumule entire temps Suite aux diffrentes
dmarches entreprises par l'Institut, auquel
s'est associ le Ministre de la Culture, les
gardens, les jardiniers et autres technicians de
surface employs au Parc seront finalement
rmunrs, grce une donation du Ministre
de l'Intrieur et des Collectivits Territoriales
(MICT). Ce qui arrive point en ces jours
difficiles prcdant la rentre des classes.
Leurs activits au Parc tant prennes
et incontournables, la Direction gnrale
de I'ISPAN est entre immdiatement en
pourparler avec le Ministre de la Culture afin
que ce personnel hautement indispensable
soit, enfin, pris en charge sur le budget de
fonctionnement de l'Institut. Une nouvelle
bataille pour la sauvegarde du Patrimoine
national est engage.
La Direction gnrale de I'ISPAN a, par
correspondence officielle, remerci de leur
immense patience ces femmes et ces hommes
sur qui effectivement repose aujourd'hui
l'intgrit de ces Monuments historiques
classes Patrimoine Mondial par l'UNESCO en
1982.
* Parcs Nationaux Historiques
Fort Jacques, nouvelle fissure
La Direction technique de I'ISPAN a effectu
le 22 juillet dernier une visit d'inspection au
Parc National Historique des forts Jacques et
Alexandre de Fermathe. Au course de cette
visit, les technicians ont pu observer une
nouvelle fissure horizontal longue de 20
mtres linaires au niveau suprieur du bastion
circulaire (Nord-Ouest) de la fortification.
Selon l'ingnieur Brunache, Directeur regional
de l'ISPAN-Nord, qui faisait parties de la mission,
ce dcollement du mur serait d l'eau de
pluie qui, s'infiltrant dans le parquet suprieur,
exerce une pousse considerable sur les murs
du bastion. Cette fissure profonde, occasionne
son tour, de nouvelles infiltrations d'eau
l'intrieur des murailles, affaiblissant ainsi
leur resistance. Le fort Jacques a fait l'objet
d'importants travaux de restauration au dbut
des annes 80 par I'ISPAN. Il a t inscrit, avec
le fort Alexandre, sur la liste du Patrimoine
National en 1995 au titre de "Monument
historique de la Rpublique d'Haiti".
BULLETIN DE LISPAN No 4 1er septembre 2009 4
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